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L’Ultr’Ardèche : Stéphane Ruel et Carment Hildebrant vainqueurs
La seconde édition de cet ultra a rassemblé 120 coureurs désireux d’affronter ce parcours magnifique, long de 216 km et cumulant 4500 mètres de dénivelé. Si la météo prévoyait de fortes pluies, les concurrents ont avant tout souffert du froid, du vent, de la neige et du relief accidenté, comprenant par endroits des rampes inclinées à 15%.
Eu égard au niveau élevé des favoris, la lutte pour la victoire s’annonçait passionnante. De nombreux spécialistes de cette discipline tenaient à accrocher ce défi titanesque à leur palmarès.
Notamment d’ex-internationaux sur 100 km, ou 24 heures, à l’instar de Jean-Jacques Moros, titulaire d’un chrono de 6h51’ sur 100 bornes, second du Spartathlon en 2005 et deux fois vainqueur de la Transe Gaule, Philippe Warembourg, 254 km au 24 heures, Emmanuel Conraux, recordman du monde du Deca Ironman, 264 km au 24 heures, Christian Leroux, 244 km également sur 24 heures et Carmen Hildebrandt, ancienne du team germanique sur 100 km et victorieuse de la Transe Gaule.
A ces noms, il convient d’ajouter pléthore d’outsiders tels Patrice Fayol, Bertrand Cochard, Eric Bonotte, Stéphane Ruel, Vincent Bailly-Salins, Laurence Suisse et Maria Pierre chez les féminines, plus d’autres.
Dès lors, Laurent Brueyre, l’organisateur apparaissait rassuré quant au spectacle qu’assureraient ces nombreux protagonistes.
Rassemblés samedi à 6 heures du matin sur la ligne de départ, les participants ont connu deux bonnes surprises. D’une part, la pluie avait cessé, d’autre part un feu d’artifice offert par le maire d’Alboussière a catalysé en eux l’énergie nécessaire à relever ce challenge.
En dépit des difficultés à accomplir, les leaders ont aligné les 54 premiers km à un rythme supérieur à 12 km/h de moyenne, parce que ce début de course ne présentait pas de réelles difficultés.
A ce point et avant d’attaquer le premier col long de 10 km et menant au Mont Gerbier des Joncs, où la Loire prend sa source, Stéphane Ruel, le Normand de Coutances possédait un avantage de 15’ sur un Jean-Jacques Moros partis très prudemment et préférant opter pour la sagesse.
Sans accélérer, mais fort de sa foulée très aérienne le « Titi parisien » est parvenu à combler l’écart.
Une fois au sommet, entre une température proche de zéro et une tempête de neige, ces deux hommes heureusement accompagnés de suiveurs dévoués ont pu se changer et revêtir une tenue adéquate, permettant de lutter contre le déchaînement des éléments.
Mi-contemplatif, mi-stoïque, Jean-Jacques Moros a simplement qualifié « D’inattendu », ce prélude à l’apocalypse, sans omettre de préciser : « Il y aura de la casse. Tout le monde ne ralliera pas l’arrivée. Cela relèverait de l’exploit »
En apparence facile, Jean-Jacques a pris la poudre d’escampette au 85e km, avant de filer vers le 100e en 9h30’ et d’atteindre avec une marge de 15’ sur son adversaire, le 116e km synonyme de second point d’élimination.
Là, quelque peu soucieux il a voulu s’asseoir et a accepté l’assiette de coquillettes offerte par une bénévole. Le geste lent, sans réel appétit et avec parcimonie, il se forçait à ingurgiter cette nourriture, lâchant entre deux haut-le-cœur : « Ca ne passe pas bien. Comme l’an passé et au même endroit, j’ai mal à l’estomac. Bon, il faut que j’y aille »
Dix km plus loin, en proie à des douleurs gastriques et transi de froid, « JJ » a été contraint de renoncer.
De la sorte, Stéphane Ruel en possession d’une large avance avoisinant les deux heures sur ses poursuivants a naturellement eu à assumer le rôle de chef de file à 75 km du but.
Solide, il ne s’est pas écroulé et a coupé le finish en 23h07’, tout surpris de triompher et heureux de souffler au boss : « Merci, je n’ai jamais vécu une course aussi dure. Merci encore. Je savais que j’avais de bonnes jambes, mais de là à gagner, je n’en reviens pas »
S’il ne pratique la course que depuis 3 ans, cet athlète dispose cependant d’un solide background. Auteur d’une performance de 7h39 sur 100 km et d’un score de 230 km en 24 heures, ce garçon discret ne manquait donc pas des fondations susceptibles de le conduire à la victoire.
Très fairplay, il se montrait presque gêné de l’avoir emporté : « Quand j’ai doublé Jean-Jacques, ça m’a fait mal. Il n’était pas bien. Je lui ai suggéré d’accepter mon Spasfon, mais il n’y avait plus rien à faire. Lorsque j’étais cycliste je détestais vaincre suite à un ennui mécanique d’un concurrent. Là ça correspondait quelque part à ce genre de situation. Et une fois seul devant j’ai refusé d’envisager la victoire, parce que la route était encore longue. Jusqu’au 190e km, ça n’a pas arrêté de grimper. J’ai ramé. Ce n’est que sur la fin que j’ai cru en mes chances »
Désormais, ce compulsif va enchaîner le Raid de l’Archange, 280 km entre le Mont-Saint-Michel et la Pointe de la Hague dans 15 jours, puis l’UTMB, les France des 24 heures et poursuivre à l’infini, happé par la spirale de l’ultra.
Vincent Bailly-Sallins a terminé second en 25h40’ devant Eric Bonotte, 25h49’.
Chez les féminines, l’Allemande Carmen HildeBrandt, 10e au scratch a plié l’affaire en 27h38’ devant Laurence Suisse, 14e et 28h55’
Maintenant, demeure toujours une quarantaine de forçats sur ce bitume ardéchois. Il leur importe de boucler cette boucle en moins de 36 heures, faute de quoi ils seront éliminés.
Sinon, une trentaine d’abondons sont à déplorer. Un chiffre somme toute minime en comparaison de l’aspect herculéen de la tâche, qui attendait ces sportifs.